Dans ce nouvel épisode de Discussions, nous accueillons Geoffroy Barre, rédacteur expérimenté avec plus de 12 ans de métier, qui a su prendre le virage de l’IA générative. Geoffroy se définit désormais comme un “rédacteur augmenté”, combinant son expertise humaine avec des outils comme Claude pour maximiser l’efficacité et la qualité de ses contenus. Ensemble, nous abordons la question de l’automatisation de la rédaction et les limites à ne pas franchir pour préserver la valeur ajoutée des contenus.
Ce qu’il faut retenir :
- Utilisez l’IA pour des contenus simples, mais confiez les contenus complexes ou à forte valeur ajoutée à un rédacteur humain.
- La touche humaine reste indispensable pour apporter contexte, expérience et éviter les erreurs, surtout sur des sujets spécialisés.
- Des prompts précis et détaillés maximisent la qualité du contenu généré, mais une relecture experte est toujours nécessaire.
- Soyez transparent sur l’utilisation de l’IA et optez pour une spécialisation pour vous différencier dans la rédaction.
- L’intégration de l’IA dans les CMS facilitera l’automatisation, mais augmentera le risque de contenu standardisé et moins différencié.
Chapitres de la vidéo
00:00 Intro
01:16 Quel contenu pour l’IA ?
04:19 Rédaction interne VS rédaction externe
07:17 Rédaction augmentée
09:41 Le prompting
16:42 Pourquoi tester plusieurs IA
19:14 Quelles IA pour quels contenus ?
21:37 Contenus IA sans relecture
24:32 Les rédacteurs vont mourir ?
Retranscription de la vidéo
Laura : Salut à tous, on est de retour dans Discussions pour parler cette fois de contenu généré par l’IA. J’accueille avec grand plaisir Geoffroy Barre. Salut Geoffroy !
Geoffroy : Salut Laura, et bonjour à toutes et à tous.
Laura : Geoffroy, tu es rédacteur depuis 12 ans, si je ne me trompe pas ?
Geoffroy : C’est ça, depuis 2012 exactement.
Laura : Et tu as pris le virage ChatGPT, mais pas que, les IA génératives aussi depuis un ou deux ans ?
Geoffroy : Oui, depuis que ça a commencé à se généraliser effectivement. J’ai embrassé la révolution de l’IA pour la production de contenu, on peut dire ça.
Laura : Et du coup, on bosse ensemble, on ne va pas trahir de secrets, depuis quasiment 10 ans d’ailleurs. Aujourd’hui, on va répondre à une question essentielle : jusqu’où peut-on automatiser sa rédaction de contenu sans perdre en qualité ?
Première question : quel contenu on peut rédiger avec de l’IA et quel contenu on ne devrait pas rédiger avec de l’IA ?
Geoffroy : Il y a des contenus qu’on peut confier à l’IA. Mon sentiment, c’est que si on a un maximum d’informations, un maximum de contexte, plein de données à lui confier, et que c’est un contenu sur lequel tu as une faible valeur ajoutée personnelle, on peut y aller.
Typiquement, si vous avez un site e-commerce et que vous avez des fiches produits et que vous vendez des produits comme plein d’autres concurrents, vous pouvez apporter votre touche avec l’IA. Vous n’allez pas faire des fiches produits révolutionnaires. Si quelqu’un cherche un produit, ce qui va révolutionner la fiche, c’est plutôt comment le produit est présenté, ce que vous mettez en avant comme bénéfices. Ça, vous pouvez le faire avec l’IA.
Par contre, ce que tu ne peux pas confier à l’IA pour l’instant, à mon sens, c’est tout ce qui est très nouveau, très frais, je pense à des articles d’actualité. Alors, y’en a qui vont dire qu’on peut faire du Discover avec de l’IA, c’est vrai, mais par exemple, une présentation d’une nouvelle loi ou une sortie du Conseil des ministres avec toutes les informations qui tombent, l’IA va être un peu sèche. Tu peux lui donner le communiqué de presse et lui demander de le remouliner, mais tu vas avoir toi ton jugement à chaud, les informations que tu peux capter sur le vif, que tu vas enrichir… Donc tout ce qui est contenu frais et puis un autre type de contenu qui selon moi ne doit pas être trop confié à l’IA, c’est là où tu peux vraiment apporter une valeur ajoutée humaine, tes données personnelles qui ne sont pas encore sur le web, qui sont peut-être dans des livres, c’est difficile pour l’IA de les trouver.
Laura : Pour donner un exemple, sur Abondance, on essaie de créer des contenus “froids”, de conseil, et on se rend compte quand on demande à ChatGPT un contenu sur comment bien se vendre en tant que consultant SEO, il va nous donner des conseils qu’il connaît, mais nous, on a des vrais tips du terrain qui ne sont pas forcément présents sur le net. Donc, c’est souvent plus intéressant d’écrire et de dire comment on fait vraiment plutôt que demander à une IA de reprendre ce qu’il a dans son dataset.
Geoffroy : Un, il y a ta connaissance personnelle, et deux, moi je dis souvent que le savoir est dans les livres. Là on voit pas mais je suis entouré d’un millier de bouquins, majoritairement sport auto mais aussi finance, santé, développement personnel.
On fantasme toujours sur le volume de contenus qui sont produits chaque jour sur internet, la masse de données que ça représente, mais y’a encore plein de savoirs qui sont dans les bouquins et qui ne sont pas sur le web. C’est ce qui peut faire la différence par rapport à un contenu généré par IA. L’IA n’aura pas cette connaissance humaine ultra spécifique, on parle vraiment de détails. Ca va se jouer dans les détails la création de contenu à l’avenir. Faut essayer d’aller chercher ça.
Laura : Pour rebondir sur ce que tu dis, est-ce qu’il y a des contenus que tu laisses entre les mains de tes clients à rédiger eux-mêmes ? Est-ce que toi, tu es capable de tout rédiger, ou y a-t-il des choix à faire entre ce qu’on confie à un rédacteur et ce qu’on garde pour soi dans une entreprise ?
Geoffroy : Historiquement, moi je peux tout écrire. C’est ce que je dis à chaque fois. Je peux écrire sur toutes les thématiques. Par exemple, hier, un prospect m’a demandé d’écrire sur l’entretien du parquet et les produits de traitement du bois. On a eu une bonne conversation, puis à un moment il prend du recul et il me dit : “Mais en fait, vous ne connaissez pas le domaine, donc est-ce que je devrais passer par un spécialiste ?” Je lui ai répondu : “Non, je confirme, je n’y connais rien, mais je vais apprendre.” C’est mon métier. J’écris pour des entreprises qui font de la garde d’enfants à domicile, de l’investissement dans les SCPI, qui vendent des voitures… Je suis devenu spécialiste de plein de thématiques que je ne connaissais pas à la base, même très pointues parfois.
En fait, on peut potentiellement tout confier à un rédacteur, mais la seule limite qui reste et qui restera avec l’IA, c’est le contenu à caractère confidentiel. Pour des données sensibles ou des discours de marque très spécifiques, il vaut mieux laisser ça à l’interne. Plus l’entreprise est grosse, plus il y a des personnes responsables du discours de marque, du vocabulaire employé, et dans ces cas-là, par expérience, il vaut mieux leur laisser le contenu. Sinon, tu risques d’avoir 50 retours sur la tournure des phrases. L’IA ne change pas grand chose, je pense que c’est plus la tonalité, la valeur du contenu, ça je ne conseille pas de le prendre. C’est un conseil que je donne aux rédacteurs, peut-être qu’il y en a qui nous regardent. Quand t’es rédacteur web, ne prends pas du contenu où tu sens qu’il y a beaucoup d’ADN de l’entreprise.
Laura : C’est vrai, les pages d’accueil, les pages “Qui sommes-nous ?”, “À propos”, on est quasiment dans l’UX Writing. Je pense que ce serait une perte de temps de rédiger ces pages-là avec l’IA.
Geoffroy : Ca m’est arrivé de faire des pages “Qui sommes-nous ?” pour des clients. Donc je leur demande : “Quelles sont les données d’entrée, qu’est-ce que vous me donnez comme informations ?”. Ils ne savent pas trop, alors je demande depuis combien de temps ils existent et ils répondent “ah, vous avez besoin de ça”. Y’a des entreprises qui peuvent le générer par IA mais je pense que c’est des pages qu’il faut garder en interne, faut faire l’effort. Y’a des boîtes qui voient pas l’intérêt d’écrire ce genre de texte alors que souvent, ça a une grande valeur si c’est le fondateur qui se pose, qui prend une heure pour écrire le contenu et après on passe en tant que rédacteur pour remettre en forme.
Laura : Tu disais en introduction que tu es passé à ChatGPT, ou tout du moins aux IA génératives, depuis environ deux ans. Il y a un terme que tu utilises souvent, c’est “rédacteur augmenté”. Comment est-ce qu’on passe de rédacteur à rédacteur augmenté ? Comment est-ce que tu traverses cette vague qui a révolutionné ton métier ? Et aujourd’hui, tu assumes et tu le dis, c’est un argument de vente d’être rédacteur augmenté.
Geoffroy : Le terme ne vient pas de moi, la paternité revient à Baptiste Guiraud, qui est un autre rédacteur, qui est le premier rédacteur augmenté, on va dire comme ça, que vous pouvez trouver sur les réseaux sociaux, moi je le suis sur Twitter, et qui est assez actif sur toutes ces questions de rédaction par IA. Du coup, je lui ai emprunté le terme, il l’a validé, c’est bon, j’ai le droit de l’utiliser.
Non mais plus sérieusement, c’est vrai que quand il a expliqué ça, j’ai trouvé que c’était hyper pertinent, parce que je me suis toujours senti comme étant un rédacteur efficace. Maintenant, c’est plus vraiment des secrets, donc je peux le dire : depuis le début, j’utilise des logiciels de reconnaissance vocale pour dicter. J’écris très peu finalement. Comment ça marche pour ceux qui ne sont pas familiers avec ça, la diction ? Tu paramètres une touche sur ton clavier, ou quand tu appuies dessus, ça ouvre ton micro et ça dicte. Du coup, ça génère dans une petite boîte de dialogue, tu as ton texte. Si tu es dans Word, ça le met dans Word, mais sinon, si tu es sur Google Chrome, ça t’ouvre une boîte de dialogue et ensuite tu peux le balancer dans une IA ou dans ton éditeur de texte.
Moi, c’est quand il y a un truc qui me vient, plutôt que de dire à une IA : “reprends ton texte mais ajoute ceci”, je le dicte directement. J’ai aussi automatisé beaucoup de tâches avec un Stream Deck, un outil utilisé normalement par les streamers, mais que moi j’ai configuré pour faire des choses comme mettre en gras, insérer des intertitres, etc. Ça me permet de gagner des petites secondes.
Donc, quand l’IA est arrivée, je me suis dit : “C’est un truc de fou, je vais évidemment m’en servir“. Je suis devenu augmenté, parce qu’en fait, tu peux vraiment aller plus vite, clairement. C’est un vrai enjeu aujourd’hui. Les clients demandent beaucoup plus de production par rapport à avant. Si tu factures à la journée, avant tu vendais trois ou quatre contenus, maintenant ils en veulent dix. Et ils ont raison, parce qu’on va plus vite à les écrire.
Par contre, il faut être transparent. Il faut dire : “J’utilise de l’IA”. Ce n’est plus un secret que tu peux garder en disant “j’utilise de l’IA, le client ne le sait pas, et je lui vends une prestation à 150 euros alors que ça m’a coûté même pas 10 euros à faire”. Moi, je suis assez transparent sur le fait que je l’utilise, et d’ailleurs, mes clients viennent chercher ça aussi.
Laura : Rentrons dans le vif du sujet du “comment”. Pour moi, le prompting, c’est une des étapes les plus importantes. Je ne te demande évidemment pas de nous livrer tous tes secrets, mais quel conseil toi tu aurais à donner pour aider les personnes à améliorer leurs prompts et du coup sortir des contenus de meilleure qualité ?
Geoffroy : Mon premier conseil, c’est d’être précis sur ce qu’on veut. En gros, on a un outil qui est dingue en face, que ça soit ChatGPT ou d’autres modèles. Il y a une sensation incroyable la première fois que tu poses une question, même sur un truc un peu pointu, et que tu vois une réponse qui déroule. C’est grisant. Mais il ne faut pas laisser trop de liberté à l’outil. Il y a plus d’un an, souvent, on faisait des parallèles en disant que ChatGPT c’était un peu comme un enfant, pas au niveau des connaissances, mais au niveau du fonctionnement. Si tu veux qu’il marche bien, il faut lui répéter plusieurs fois la même consigne. En tout cas y’avait ce côté un peu turbulent : tu lui dis un truc, il ne le fait pas, alors tu dois le répéter.
Surtout ce qu’il faut, c’est être précis : “Je veux un article qui parle des bénéfices qu’on peut avoir à consommer des compléments alimentaires si on a une carence en tel truc” ou tu peux demander un article générique, mais à l’intérieur il faut que tu lui dises de faire une partie dédiée à l’apport des compléments alimentaires pour les sportifs… parce que lui ne va pas le deviner tout seul. Au mieux vous avez un peu de chance, il va lui-même prendre l’initiative de proposer des parties censées pour donner un contenu cool (mais s’il le fait pour vous il va aussi le faire pour votre concurrent qui va utiliser l’IA), ou alors vous êtes malins et vous anticipez en lui demandant les parties. Ce qu’il faut, c’est être précis et ne pas hésiter à faire long.
Mon deuxième conseil, c’est de faire des prompts longs. Des prompts de 500 mots, 800 mots, voire 1 000 mots. On peut couper en deux prompts. Moi, je sais que tu m’as déjà dit parfois que tu fais un premier prompt, tu génères quelque chose, puis tu repasses. Moi, je fonctionne plutôt comme ça.
Et puis, le troisième conseil que je pourrais donner, c’est de ne pas se laisser avoir par l’IA. Toujours challenger, en fait, ce que l’IA te dit. Là, ça rejoint ce que je disais juste avant.
Par exemple, si elle te sort une étude, moi j’ai un exemple précis : j’ai une cliente qui est dans le domaine du bâtiment, un domaine très normé. L’IA me sort des normes qui n’existent pas. C’est-à-dire qu’elle me dit : “Comme on le reprend dans la norme machin…”, elle te sort un numéro de norme, une année, un institut. Tu cliques sur le lien, bien sûr c’est une page 404. C’est incroyable. Et donc, si tu veux automatiser, parce que c’est un peu la question du jour, oui on peut automatiser. Mais moi, je n’ai pas de solution aujourd’hui pour balancer un contenu en ligne sans avoir une relecture par quelqu’un du métier.
Un rédacteur pour la forme, et quelqu’un du métier pour le fond. Pour moi, ça s’arrête là. On ne peut pas faire autrement, sauf sur des textes qui, comme je disais, ont peu de valeur ajoutée, comme des fiches produits. Oui, il y a un enjeu commercial, il faut avoir des tournures de phrase marketing, insérer des CTA, ça, OK. Mais on ne va pas prendre le risque de produire du contenu qui risque d’être faux ou trompeur.
Pour moi, faire un bon prompt, c’est être complet, précis, très spécifique. Et par contre, quand tu as le résultat, le challenger, et peut-être refaire un prompt, demander d’améliorer, toujours faire par itération. Demander d’améliorer, de revoir, et de gommer les tournures “IA”. Je rajoute ça en petit bonus, c’est le petit topping, mais on peut demander à une IA de gommer les tournures de phrases qui font trop IA.
C’est marrant, mais tu peux lui dire que ça, ça sonne IA. Moi, le modèle que j’utilise le plus, c’est Claude. Je lui dis souvent : “Dans tel paragraphe, gomme les tournures de phrases qui font trop IA, arrête d’employer ça, on sent que le texte est généré, essaie d’efface ça.” donc déjà le texte ne commence plus par “dans un monde où…” ou “à l’ère du digital…”. Ça, ça dégage.
Il ne faut pas oublier le sens du truc. Si là vous nous écoutez et que votre objectif, c’est de faire du Discover, de sortir 20 ou 30 articles par jour automatisés, et au pire, dans un article, on invente une étude… En fait, je pense que vous vous en foutez un peu. Ce n’est pas l’objectif.
Par contre, si vous voulez avoir des trucs clean, les articles qui sont plus Evergreen, c’est-à-dire un comparatif de perceuses, par exemple — je connais pas le monde des perceuses encore une fois — mais j’imagine qu’il y a des technologies qui évoluent.
Mais s’il y a un modèle qui est référent, on peut peut-être se dire que pendant un an, deux ans, trois ans, en tout cas des marques référentes, ça va rester. Donc, il y a quand même un intérêt à soigner ce contenu, à le générer en partie par l’IA, et ensuite à rajouter une couche humaine dedans, et à faire un vrai beau comparatif qui, pendant deux ou trois ans, sera pertinent et pourra rapporter du business, que ce soit en affiliation, en vente de liens, ou pour vous-même si vous êtes vendeur.
Mais la couche qui va manquer — et c’est là où, je l’ai déjà dit mais je le répète — c’est le côté humain et la faculté qu’on a aussi, nous, à faire des associations d’idées que l’IA ne fait pas. Je prends un exemple très précis : moi je suis spécialiste des courses d’endurance, des courses de voiture. L’IA peut m’aider à faire des résumés de courses, éventuellement si je prends tous les communiqués de presse des différentes équipes, si je prends le résumé officiel et que je mets tout ça dans une IA, elle va me sortir un résumé de la course avec toutes les infos que je lui ai données.
Mais est-ce qu’elle va être capable de dire : “Tiens, cette course-là, c’est marrant, c’est un peu le même scénario que la course qu’il y a eu ici en 2019, parce qu’il y avait déjà eu cette bataille entre ces deux pilotes”, et d’ailleurs la météo était similaire ? Ou alors faire une référence aux années 80 en disant : “On se rappelle de l’épisode entre Porsche et machin…” ? Ça, pour l’instant, elle n’est pas capable de le faire. Et ça, c’est vraiment tes connaissances à toi, ta propre expérience, ta propre vie, ou des éléments qui sont compliqués pour une IA d’associer.
Donc, pour les rédacteurs qui m’écoutent, si vous voulez vous lancer aujourd’hui, pour devenir rédacteur web, je pense qu’il y a encore de la place sur le marché. On n’est pas voués à disparaître, par contre il faut être spécialisé sur une ou plusieurs thématiques et avoir un vrai background.
Laura : Tu as testé beaucoup d’IA. On en a déjà parlé, je sais que tu as testé ChatGPT, Claude, Gemini. Ma première question, c’est à quoi ça sert de tester plusieurs IA ?
Geoffroy : Moi, je l’ai fait d’abord par curiosité. J’étais sur ChatGPT quand c’est apparu, c’était le seul nom dans les médias. On avait l’impression que l’IA c’était ChatGPT. Mais après, j’ai testé d’autres IA parce que j’ai trouvé des limites. C’est important de tester plusieurs IA pour comprendre leur fonctionnement respectif et voir laquelle s’intègre le mieux dans votre process.
Pour détailler, ChatGPT, je l’utilise plus. Je l’ai utilisé beaucoup mais je l’utilise plus. Ce que je voyais et pourquoi je pourrais peut-être encore l’utiliser aujourd’hui, c’est un outil assez polyvalent. Il peut être créatif si tu le stimules un peu, tu peux lui dire : “Écris dans le style de tel auteur” ou “Fais un texte avec des métaphores sur tel sujet”, et il va le faire.
Mais je trouve pas ça fou en termes de complexité de phrases et de champ lexical. Il faut vraiment beaucoup lui en donner pour avoir un truc cool. ChatGPT, c’est le bon élève.
Gemini de Google, c’est encore pire. C’est vraiment un produit Google. Ils veulent que tu aies une réponse rapide, c’est leur priorité. Quand tu fais une commande dans Gemini, tu as une réponse en quelques secondes, et c’est souvent des listes. C’est très synthétique, très structuré, mais ça manque de profondeur. C’est comme si Google voulait te dire : “Voilà ta réponse, c’est bon, passe à autre chose”.
Alors que Claude, qui est l’outil que j’utilise le plus aujourd’hui, c’est un modèle plus conversationnel. Tu peux vraiment avoir des échanges avec l’IA, lui dire : “Le texte que tu m’as généré est bien, mais la première partie, ça tu dégages. Dans la deuxième partie, ajoute un bloc commercial, et dans la troisième partie, insère un tableau”. Il le fait. Avec ChatGPT, il y a une chance sur deux qu’il oublie une consigne ou qu’il l’interprète différemment.
Laura : Est-ce qu’il y a des IA qui se prêtent mieux à certains types de contenus, par exemple des contenus plus techniques, des contenus plus détaillés, ou des contenus où il faut un peu de storytelling ? Ou est-ce que tout se joue dans le prompt ?
Geoffroy : Par exemple, Google Gemini, je trouve que c’est super pour synthétiser un texte. Il fonctionne par listes à puces et il veut t’apporter une réponse vite comme Google veut que tu ailles vite là où tu as envie d’aller, donc si tu lui demandes de résumer un contenu, je veux les 5 points clés, ça c’est parfait.
Et après Claude est, selon moi, l’outil qu’il faut utiliser pour la rédaction de texte. C’est celui que je trouve le plus efficace. Sur ChatGPT, à une époque tu lui demandais un texte de 500 mots il t’en sortait 220. Claude tu lui demandes 800 mots il va t’en sortir 850. Mon approche c’est générer le contenu et après me poser en me disant “les concurrents ils ont ça et ça, faut que moi aussi j’en ai”, et que j’apporte une touche un peu humaine.
Par exemple si vous aviez acheté telle action en 2014 ou en 2016, aujourd’hui vous auriez fait une belle plus-value. Moi ce que je vais faire, je vais aller chercher l’évolution du cours de l’action (toutes les données sont dispo sur Boursorama ou un site de finances), je vais récupérer ce tableau, le filer à l’IA et lui dire : “Pars du principe que cette personne a investi 1000€ en 2016 et qu’ensuite tous les mois elle a mis 50€ sur cette action là. Donc quelle fraction d’actions elle a acheté chaque mois et du coup combien ça vaut aujourd’hui ?”. C’est un calcul un peu chiant à faire. Avant tu pouvais le faire dans ton Excel, et là ça t’a pris trois minutes à générer juste parce que tu lui as donné les bonnes données.
Laura : Est-ce que c’est utopique de penser qu’on peut créer un contenu de A à Z avec l’IA, sans intervention humaine autre qu’un prompt initial, et sans relecture derrière ?
Geoffroy : Pour l’instant, oui, à mon avis c’est utopique. Aujourd’hui, ce qui est possible de faire, c’est du prompt sur du prompt sur du prompt. Mais à chaque fois, l’IA ne repasse pas sur tout le contenu, elle se contente d’ajuster des sections. Ce qui marche le mieux, c’est d’avoir une base de texte et ensuite de demander à l’IA de retravailler partie par partie.
Tu peux ne pas rédiger une seule ligne de contenu, c’est possible, mais tu dois donner des consignes claires et faire des itérations. Et même là, la relecture est essentielle. Si tu fais des itérations, c’est que tu as relu. Donc, la relecture est toujours présente, même indirectement.
L’automatisation complète, comme certains le font pour avoir des sites sur Discover, ça se fait, mais je suis curieux de voir les résultats sur le long terme. Il y a des gens qui branchent des outils d’IA à leurs sites WordPress et publient automatiquement. Ça génère du contenu, ça fait peut-être des ronds à court terme, mais moi, je n’irais pas dans cette direction. Parce que j’essaie de voir mon business de manière durable.
Une automatisation comme ça, dans six mois, elle est probablement pétée. Il suffit qu’une API change, qu’un modèle d’IA évolue, et tout doit être retravaillé. Il y a eu des périodes où tout le monde voulait externaliser la rédaction, avec des rédacteurs offshore, et ça a montré ses limites. Puis, il y a eu la période du cocon sémantique, où tous les clients voulaient un cocon. Aujourd’hui, c’est la période de l’IA. C’est une révolution, c’est une vague, en tant que client il ne faut pas se laisser submerger. L’approche par cocon ce n’était pas la vérité absolue, la rédaction offshore non plus, il faut toujours savoir utiliser les différentes évolutions.
Laura : On a traversé différentes périodes dans le domaine de la rédaction, avec l’externalisation offshore, la mode du cocon sémantique… Aujourd’hui, c’est l’ère de l’IA générative. Mais selon toi, quelle est la prochaine étape ou la prochaine menace pour la production de contenu ?
Geoffroy : La prochaine grosse menace, elle apparaît, elle est déjà en place, je trouve. C’est le fait que la rédaction IA soit directement intégrée dans les CMS, que tu puisses générer du contenu dans un WordPress. Parce qu’il y a des outils de génération de contenu, mais là, je parle vraiment pas pour les rédacteurs, mais pour le client final, la personne qui a un site e-commerce ou un site d’information, peu importe. Jusqu’à présent, il fallait se connecter à une plateforme de génération de contenu et ensuite intégrer le contenu dans ton CMS.
Maintenant, la génération de contenu est directement dans WordPress avec des plugins. L’étape d’après, ça va être en deux clics dans le CMS. Je précise, parce que c’est vraiment important : quand tu as une seule étape de login à faire, ça multiplie l’adoption par les gens. Si tu dois aller sur un autre service, te loger, créer un compte, payer, ça, ça freine certains. Mais quand tu as tout en un seul point, ça, ça peut faire très mal.
L’automatisation, pour moi, s’arrête là où il faut rajouter de l’humain pour que le contenu soit intéressant et pertinent. En fait, c’est ça : utiliser ça comme une base. L’IA peut aujourd’hui faire 80 % du travail sur la rédaction pure, c’est-à-dire écrire sur un clavier ou dicter, comme je l’ai expliqué. L’IA peut faire 95 % du travail, mais ne négligez pas les 5 % qui restent. Parce que si c’est 95 % de l’effort de concentration, les 5 % restants, c’est quand même beaucoup de temps.
On disait, et on le dit toujours : quand tu mets un contenu en ligne, idéalement, il faudrait passer autant de temps ensuite à le relayer, à le faire connaître sur les réseaux sociaux, via des newsletters.
Là, c’est pareil : l’IA a fait tout ça, mais maintenant, prenez ce contenu, optimisez-le, améliorez-le, faites-le vivre. Voilà, c’est ça, c’est un peu le résumé.
Laura : Merci beaucoup, Geoffroy, d’avoir été là pour ce deuxième épisode de Discussion. C’était vraiment enrichissant d’avoir ton point de vue sur la rédaction assistée par l’IA, et je pense que c’était important de parler de ça avec un rédacteur professionnel. J’espère que cette vidéo vous a plu. On se retrouve pour le prochain épisode. Salut tout le monde !
Geoffroy : Salut !
L’article “Contenu IA – Jusqu’où automatiser ? [DISCUSSIONS #2]” a été publié sur le site Abondance.